Le premier championnat du Monde organisé après la guerre le sera à Prague, en 1947. La Belgique, alors patrie du Président de la IIHF (Paul Loicq) s'y rend avec, cette fois, une équipe que les spécialistes annoncent comme étant la plus forte jamais alignée. L'entraîneur Carlos Van den Driessche l'a sélectionnée comme suit, avec au goal, Henri Heirman et Bob Van der Heyden; en défense, Percy Lippit, Jef Lekens, Pierre Van Reysschoot et Jackie Mullenders, et à l'attaque, Hugo Van Reybroeck, Leon Van Eeckhout, Johnny Hartog, Georges Hartmeyer, Johnny Haneveer, Raymond Lombard, Hubert Anciaux, Charles Laurençin et Jules Du Pré.
L'Anversois Jackie Mullenders et le Liégeois Hubert Anciaux avaient fait savoir à la Fédération belge qu'ils ne supportaient pas les voyages en train et qu'ils préféraient effectuer le trajet vers Prague par les airs. De Bruxelles, il n'y avait aucun vol direct vers la Tchécoslovaquie (à l'époque), mais bien d'Amsterdam. Les deux compères décident donc de prendre le vol Amsterdam-Prague, précédé d'un trajet en… train, entre Anvers et Amsterdam !
Alors que la délégation belge rassemble ses troupes dans la capitale tchèque, on s'aperçoit que les gardiens manquent à l'appel: alors que l'épouse de Bob Van der Heyden avait accouché le jour même où l'équipe belge était montée dans le train, et que l'heureux papa avait choisi de partir plus tard afin de rester une petite journée de plus auprès de sa femme, le gardien titulaire Henri Heirman était retenu à Strasbourg.
La Belgique se retrouvait donc sans dernier rempart et aucun autre compatriote n'était prêt à se faire massacrer à ce poste où on évolue encore sans protection faciale… Il vient alors à l'esprit de quelques joueurs une lumineuse idée : celle de proposer au seul supporter qui a effectué le voyage avec eux, Milo Jahn, le job ultra simple de keeper.
Milo s'est bien déjà retrouvé une fois sur des patins, au sein de l'équipe bruxelloise du CSHB, mais en disant cela, on avait résumé toute sa carrière.
Le soir précédant la rencontre, les Belges louent une petite heure de glace et Jahn, affublé d'un équipement prêté pour l'occasion, prend place devant la cage.
Mullenders, Haneveer et Cie avaient discuté préalablement entre eux, afin que ce "supporter" fasse agréablement connaissance avec un championnat mondial. Dans un premier temps, tous les joueurs tirèrent sans forcer et s'arrangèrent pour que tous les lancers échouent directement sur les jambières.
Encouragé de la sorte par tous ses coéquipiers, ce Bruxellois qui s'installera plus tard en Grèce, s'en alla dormir avec la conscience tranquille du hockeyeur… rêvant déjà à ses débuts internationaux.
Le jour se lève alors sur le 16 février, date à laquelle la Belgique se trouve opposée à la Suède. Milo Jahn se rappellera toute sa vie cette rencontre: les tirs Suédois sont des missiles et n'ont rien du tout à voir avec les petits oeufs mollets que les Belges lui adressaient la veille ! Et en plus, ces Scandinaves visent à côté de ses jambières !…
La Belgique perdra la rencontre 24 buts à 1 et ce sera la première et la unique fois que Jahn jouera un match international pour la Belgique.